Un peu d’histoire… 

Saviez-vous qu’aux 17e, 18e et 19e siècles, le caribou était le grand cervidé le plus chassé par les Hurons-Wendat? En effet, il se retrouvait en importante quantité dans tous les bassins hydrographiques de la portion nord du Nionwentsïo, ainsi qu’en certains lieux sur la rive sud. Les chasseurs huron-wendat utilisaient principalement deux techniques de chasse au caribou, soit la chasse à l’épuisement et le piège à patte. Il s’agissait d’une source d’alimentation principale pour les Hurons-Wendat avant le 20e siècle et d’une espèce particulièrement utilisée pour la confection de divers objets d’artisanat, comme les fameuses poches murales fabriquées avec des jarrets de caribou. Le déclin de la population de caribou au 20e siècle a nécessité une adaptation des pratiques de chasse des Hurons-Wendat, qui se sont alors davantage tournés vers la chasse à l’orignal, dorénavant plus abondant dans le Nionwentsïo. 

Philip J. Bainbrigge, « Portrait of Canadian Indian Nicolas Vincent wearing snowshoes », 1840. Aquarelle, 12.7 x 10.2 cm. Library and Archives Canada, archival reference number R11935-3, e006608816. 

Le caribou de Charlevoix – une réintroduction réussie qui n’a pas durée…! 

Au début des années 1800, un important déclin des populations de caribou a été observé en Amérique du Nord. Ce déclin, particulièrement important à la limite sud de la forêt boréale, près des secteurs densément peuplés, est à l’origine de l’isolement de la population de Charlevoix. Par la suite, l’expansion rapide des activités humaines, comme l’augmentation de la chasse du caribou, la destruction de l’habitat par l’exploitation forestière et l’augmentation de la prédation par le loup et de l’ours, a généré une importante diminution du nombre de caribous.  À cet égard, la tradition orale huronne-wendat concorde avec la littérature scientifique. En effet, il est bien documenté que les chasseurs hurons-wendat observaient, au début du 20e siècle, une importante diminution de la population de caribou dans le Nionwentsïo qu’ils associaient à une augmentation significative de la population de loups.   

Cet important déclin a été suivi d’une réintroduction dans les années 1960. Pour ce faire, des caribous ont été capturés à près de 700 km au nord-est de Québec et 85 caribous ont été remis en liberté dans Charlevoix. À partir de la réintroduction, la population de caribous a été en constante augmentation, ce qui témoignait du succès de cette réintroduction. Cependant, depuis 1992 le nombre d’individus ne fait que diminuer, à un point tel que depuis 2003, le caribou est considéré comme une espèce en péril au Canada et depuis 2005 comme une espèce vulnérable au Québec.  


Tableau démontrant l’évolution du nombre de caribous dénombrés durant les repérages et les inventaires aériens de la population de Charlevoix 1973-2021 (tiré de (Hins, 2021)

Depuis la réintroduction des caribous, les forêts dans Charlevoix ont beaucoup changé dû principalement à l’exploitation forestière, mais aussi en raison d’une épidémie de tordeuse des bourgeons de l’épinette et des feux de forêt. Dans Charlevoix, ces changements ont perturbé et transformé l’habitat de la population de caribou de Charlevoix. Les coupes forestières et les jeunes forêts sont des peuplements forestiers recherchés par l’orignal. Par conséquent, la population d’orignaux a significativement augmenté, entraînant avec elle une augmentation de prédateurs sur le territoire, soit le loup gris et l’ours. Ces derniers en plus d’être plus nombreux sont également plus efficaces puisque l’exploitation forestière s’accompagne d’un important réseau de chemins forestiers. Les loups et les ours, en utilisant les chemins forestiers, ont plus de facilité à se déplacer, peuvent parcourir de plus grande distance et ont plus de facilité à trouver leur proie. L’ensemble des proies, et particulièrement le caribou, se trouvent affecté. 

Agir concrètement pour le rétablissement du caribou forestier de Charlevoix 

Depuis de nombreuses années, le Conseil de la Nation huronne-wendat participe au rétablissement du caribou de Charlevoix. De nombreuses actions ont été entreprises par le Bureau du Nionwentsïo pour favoriser le rétablissement de cette espèce qui était autrefois indissociable de la vie de nos ancêtres.  

Restauration de l’habitat  

 Le caribou recherche, la majorité du temps, de grands secteurs de forêts matures de résineux. Tel que mentionné précédemment, la quantité de grands secteurs de forêt mature a grandement diminué dans les dernières décennies. La restauration de l’habitat est donc primordiale pour le rétablissement du caribou. Sans habitat, sans territoire à l’image de ses besoins, le caribou éprouve bien des difficultés.  

Afin de favoriser le rétablissement de l’habitat du caribou, la coupe forestière est déjà limitée dans certains secteurs. Un autre moyen d’assurer la restauration de l’habitat du caribou est de fermer certains chemins forestiers qui fragmentent le territoire. Des chemins non utilisés ou très peu utilisés peuvent se refermer naturellement. Cependant, plus le sol est compacté, plus la fermeture naturelle des chemins sera longue et ardue. Ainsi, des travaux mécaniques pour accélérer la reprise de la forêt dans le chemin sont réalisés dans certains tronçons. En travaillant à fermer plusieurs chemins dans un même secteur utilisé par les prédateurs, la taille des massifs de forêts résineuses est alors considérablement augmentée et la prédation y est diminuée.   

Jusqu’à maintenant, le Bureau du Nionwentsïo a participé à l’identification de certains chemins pouvant être fermés. Wendake Construction a également réalisé un contrat de fermeture de chemin pour le ministère des Ressources naturelles et des Forêts durant l’été 2022 dans le secteur du lac à Jack de la Réserve faunique des Laurentides.  

Gestion des prédateurs 

La prédation par l’ours et le loup nuit grandement au rétablissement de la population de caribou. Dans Charlevoix, l’ours est reconnu pour être un important prédateur de faon de caribou. La prédation sur les faons de caribou empêche la venue de nouvelles générations de caribous. À court terme, un moyen de diminuer la prédation est de réaliser un contrôle de l’ours noir près de la zone de mise bas du caribou afin de protéger les faons. Cette action était nécessaire pour assurer la survie de la population de caribou dans Charlevoix. Le Bureau du Nionwentsïo a donc réalisé un contrôle de l’ours noir de 2013 à 2021.  

Le loup est également reconnu pour être un prédateur important du caribou adulte. Cependant, dans Charlevoix, l’impact du loup sur la population de caribou demeure moins connu. Afin de travailler avec les meilleures connaissances disponibles, le Bureau du Nionwentsïo participe à un projet de suivi télémétrique pour en connaître davantage sur les déplacements des loups, le nombre de meutes, le comportement de prédation sur le caribou, etc. 

Diminuer la motoneige hors-piste 

Les activités de motoneige hors-piste peuvent avoir des impacts relativement importants sur les caribous. Les motoneiges peuvent atteindre de grandes vitesses, effectuer des changements de direction rapides et elles produisent beaucoup de bruit. Ces stimulus alarment et stressent les caribous et toutes autres espèces animales, notamment l’orignal. Les caribous cherchent à fuir les motoneigistes, peuvent rapidement s’épuiser et réduisent leurs réserves jusqu’à en mourir. Le Bureau du Nionwentsïo poursuit donc ses activités de sensibilisation auprès des motoneigistes afin de limiter les activités de motoneige hors-piste dans les secteurs d’intérêt pour le caribou.  

M. Jean Bergeron, ancien gardien de territoire au Bureau du Nionwentsïo, réalise de la sensibilisation auprès de motoneigistes.

Mettre les caribous en enclos (menés par le MFFP) 

En juin 2021, le ministère de la Forêt, de la Faune et des Parcs a pris la décision unilatérale de mettre les caribous de Charlevoix en enclos. Cette mise en enclos a pour objectif de protéger les faons et adultes caribous afin d’assurer une augmentation signification de la population. La Nation huronne-wendat n’a pas été consultée par rapport à cette décision de mise en enclos. Cependant, des membres de l’équipe du Bureau du Nionwentsïo ont participé à ces travaux afin de s’assurer que la capture et la manutention des caribous se faisaient de manière respectueuse et sécuritaire pour les caribous.  

Participer aux inventaires aériens de caribous et d’orignaux (menés par le MFFP) 

Pour évaluer les tailles des populations de caribous, l’outil utilisé par le ministère de l’Environnement, de la lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs est la réalisation d’inventaires aériens (en hélicoptère). L’équipe du BN a donc participé à des inventaires de caribous et d’orignaux depuis plusieurs années.  

M. Akian Gros-Louis Picard, technicien de la faune au Bureau du Nionwenstïo participe à un inventaire aérien de caribou

Vous souhaitez en connaître davantage sur les actions du Bureau du Nionwentsïo pour le rétablissement du caribou de Charlevoix? Contactez-nous à administration@wendake.ca et suivez la page Facebook du Bureau du Nionwentsïo.